Le lyrisme amoureux dans la poésie du XVIème et XIXème siècle
III Proposition de plan et d'idées pour commentaire composé sur le poème de Louise Labé " Tant que mes yeux pourront larmes épandre "
Nous allons établir un plan en deux parties s'opposants
à première vue mais dont le poème fait une jonction
particulièrement intéressante. Ainsi, nous mettrons en avant
les deux thèmes principaux et l'originalité de manière
concise. La présente proposition montre la tonalité générale
des parties et de la jonction, et précise les idées qui seront
développées en montrant sur quels arguments issus du texte
elles s'appuient ; lorsque l'interprétation découle d'une
suite logique, pour éviter les répétitions nous ne
diront pas à nouveau le vers de la citation.
Afin de faciliter la compréhension, des tableaux récapitulent
les idées exprimées.
a) Introduction
- Sur le poème : Ce poème est extrait des "
uvres " de Louise Labé datant de 1555.
- Autour du poème : Il se situe entre " Ah si j'estois en ce
beau sein ravie ", aux thèmes assez similaires de l'amour d'un
homme et de la mort, et " Pour le retour du Soleil honorer ".
- Les questions que soulèvent le poème : Comment Louise Labé
fera-t-elle face au fait d'avoir été quittée par l'homme
qu'elle aime ? Envisage-t-elle l'avenir sous un angle nouveau ?
b) Les regrets
On trouve du regret dès lors qu'il y a un rappel d'évènements
passés auxquels l'auteur semble devoir la tristesse du moment présent.
Or, il y a dans ce poème :
- le rappel d'évènements : "
a l'heur passé avec toi "
- Un champ lexical de tristesse (larmes, sanglots,
soupirs) justifié par le rappel (le champ lexical est dans la même
strophe que " a l'heur passé avec toi ").
De plus, le mot de regret est directement mentionné sous sa forme
verbale (" regretter ").
Le regret est suffisamment fort pour en arriver à une véritable détresse morale (2ème et 4ème strophe) qui influe sur la condition physique (1ère et 3ème strophe).
Idée exprimée dans le commentaire
composé
|
Appui sur le texte
|
Il y a du regret car on trouve :
- Le rappel d'évènements - De la tristesse |
Dans la même strophe, nous trouvons :
- " a l'heur passé avec toi " - un champ lexical de tristesse : larmes, sanglots, soupirs |
Le regret est très fort, il conduit à
une détresse morale et physique
|
Le mot central d'esprit est répété dans les strophes 2 et 4, autour desquelles s'articule un thème moral. Des parties purement physiques se trouvent dans les strophes 1 et 3 avec des organes répétés (la gorge et les yeux). De plus, les qualificatifs se rapportent à des plans souvent physiques (épandre, tarir, cassée, impuissante). |
c) Jonction entre les regrets du passé et
les espoirs du futur
Malgré tout ses regrets et le malheur qui l'accable, Louise
Labé trouve une énergie et une force de caractère (les
rimes des deux premières strophes sont des infinitifs ; à
son époque, dû à ses activités, on jugeait effectivement
Louise Labé comme une femme de caractère) pour se tourner
vers le futur. Dans la femme triste ne sachant plus vraiment que faire (confusion
des rimes aux deux dernières strophes ; pas de type bien défini)
se trouve un dernier sursaut, une tentative finale,
pour espérer être à nouveau avec l'homme qu'elle aime
et qui l'a délaissé.
Idée exprimée dans le commentaire
composé
|
Appui sur le texte
|
Louise Labé a une force de caractère
|
Les vers des deux premières strophes sont
des impératifs
|
Sa tristesse s'exprime par une forme confuse
|
Les rimes des deux dernières strophes n'ont
pas de type bien défini. Bien que dans ce poème, rien
ne soit laissé au hasard, on peut y voir un reflet de la confusion.
|
d) L'espoir
Louise Labé garde ainsi espoir et
fixe le moment jusqu'où elle pense pouvoir s'y tenir (" quand
mes yeux je sentirai tarir, ma voix cassée et ma main impuissante).
Elle ne peut pas se résigner à sa situation
qu'elle renie au fond d'elle, en refusant d'y croire, et en attendant encore
quelque chose du lendemain. Cependant, si ces lendemains ne se révèlent
pas meilleurs, elle perdra alors toute force et songe même à
se laisser mourir (" ne pouvant plus montrer signe d'amante,
prierai la mort noircir mon plus clair jour ") ; elle révèle
une tristesse intense.
Idée exprimée dans le commentaire
composé
|
Appui sur le texte
|
Elle garde espoir et se fixe le moment où
elle n'y arrivera plus
|
" quand mes yeux ne sentirai tarir, ma voix
cassée et ma main impuissante "
|
Si ses problèmes de cur ne sont pas
réglés, sans amour il n'y a plus de vie
|
" ne pouvant plus montrer signe d'amante, prierai
la mort noircir mon plus clair jour "
|
e) Conclusion
En se retrouvant séparée de l'homme qu'elle aime,
Louise Labé est plongée dans un profond désespoir moral
se retrouvant dans son physique ; elle exprime tous ses regrets. Cependant,
en raison de sa grande force de caractère, elle espère encore
; l'intensité de l'amour qu'elle ressent vaincra pourtant cette énergie
si ses espoirs se révèlent vains, et elle ne découvre
alors comme seule solution que la mort.
Elle nous livre ici un poème aux sentiments
profonds et avec une superficialité relativement restreinte. De plus,
la forme est extrêmement travaillée avec une opposition entre
les regrets et l'espoir, et une certaine complémentarité nuancée
sur le physique et le moral. Elle n'a pas la plus grande originalité
mais ne souffre pas de défauts visibles.
f) Notes complémentaires et idées envisagées
Suivant le temps nous étant imparti à la rédaction
du commentaire composé, nous pouvons rajouter d'autres éléments
qui ne sont que des détails mais qui peuvent faire une différence
notable. Voici quelques idées qui pourraient être intégrées
pour étoffer certaines parties :
- Fortes similitudes avec le poème " Oh
si j'estois en ce beau sein ravie ". On y parle de l'homme aimé,
de mort et de vie pour lui. Le ton est nettement plus joyeux mais il faut
noter que l'association mort/homme aimé est donc déjà
venue chez Louise Labé. On peut s'appuyer dessus dans la Conclusion
pour prouver qu'il n'y a pas une grande originalité.
- Le thème du luth l'accompagnant dans sa détresse
n'est, lui non plus, pas nouveau. En effet, voir le premier quatrain de
" Lut, compagnon de ma calamité ". Une fois encore,
il est possible de prouver le manque d'originalité.
- On peut aussi dire, mais c'est très fortement discutable, que le
thème de l'espoir qui peut être vain est déjà
apparu. Voir le sonnet " O longs désirs,
O esperances vaines ".
- A partir du luth, on peut parler de littérature
musicale si l'on parvient à démontrer une certaine musicalité
au poème. Il ne s'agit que d'une idée car, s'il est
très riche pour sa composition, il n'en est peut-être pas pour
autant musical.
- Faut-il voir dans le vers " Tant que ma main
pourra les cordes tendre " le début logique pour le luth ou
une tonalité plus implicite en référence au fait qu'elle
était entourée de cordonniers ? On peut envisager un
double sens, mais en évitant de s'y risquer puisque les preuves sont
quasi-nulles.
- Sur la force de la femme, la vie de Louise Labé en est une preuve
convaincante. Elle est initiée aux métiers
d'armes, a participé a des tournois, et revendique les droits des
femmes (divers, mais essentiellement sur leurs participations littéraires).
- Si l'on étudiait plus particulièrement Platon
et Pétrarque, il serait possible de montrer dans quelle mesure elle
s'en inspire et personnalise leurs idées ; relatif à
la conclusion sur l'originalité.